ANNE BLANCHET             BIOGRAPHIE 2005

Anne Blanchet a commencé son activité artistique aux Etats-Unis en 1983, invitée à la Carnegie Mellon University de Pittsburgh. Le travail des artistes minimalistes tels que Judd, Carl André, Ryman, Serra ou Walter de Maria l’ont interpellée, mais c’est le travail de James Turrell sur l’espace et la lumière qui l’a particulièrement marquée. De ces confrontations, elle a gardé “le goût des tensions extrêmes dans un dépouillement radical, tout en exacerbant une implication très physique du corps et des sens” (Françoise Jaunin, Dessins de lumière et musique visuelle, 24 heures, 13 septembre 2000).

De 1984 à 1989, Anne Blanchet réalise des installations de grande taille, sortes d'architectures d'eau et de lumière. Espaces à penser. C'est la simplicité des lignes, l'économie de moyens, la radicalité du propos, l'absence de tout geste de facture, qui sont à la base de son propre travail, focalisé surtout sur la lumière, l’espace et le mouvement. Lumière en tant que révélateur de mouvement (EMERGENCES, 1992-5), qu'outil de dessin (LIGHT DRAWINGS, dès 1994 ).

Pour Bex et Arts 1996, "Babylone, un jardin suspendu", Anne Blanchet " suspendait ", dans le parc de l’exposition, sur cinq grands panneaux de verre réfléchissant, les montagnes situées de l’autre cˆté de la vallée. L'orientation de chacun de ces panneaux avait été calculée, de telle façon que de l’un à l’autre le paysage bascule pour le spectateur, même lorsque ce dernier restait immobile devant la pièce. (XLVII,1996, dont la photo a fait la couverture des rapports de Pro Helvetia 96-97).  Mouvement, lumière, changements d'intensité de couleur dus à la lumière, elle part alors vers ce qu'elle appelle la "musique visuelle". Les danse et musique contemporaines ont toujours tenu pour elle une place importante (Simone Forti, Trisha Brown, Laura Dean, Karol Armitage, Cage, Takemitsu, Pierre Henry, Feldmann, Grisey, etc.)
C'est avec PORTES 97, musique visuelle, qu’Anne Blanchet a réalisé sa première "musique visuelle". Cinq portes coulissantes en verre (550 x 300 x 1500 cm) s'ouvraient et se fermaient en permanence, chacune à un rythme différent. Installation  en constant mouvement, indépendamment du passage de personnes (Forum d'Art Contemporain, Sierre; Galerie MDJ, Neuchâtel, 1997).

Avec les trois installations PASSAGES, musique visuelle, elle a présenté d’abord face à face (Bex et Arts, 1999), puis en épi et montées sur des socles de trois mètres (Sierre 1999, Genève, 2000), une série de dix barrières de passages à niveaux longues de 6m, qui montaient et descendaient chacune à un rythme différent. “ Ballet stupéfiant, chaque barrière possède son propre jeu temporel, réglé sur ordinateur (....) pour une configuration jamais deux fois identique. (....) L’imagination se laisse prendre au piège, envoûtée par l’amplitude qui se dégage de ce croisement jamais synchrone".

Paradoxalement, l’ensemble évoque la densité et le calme abyssal des profondeurs marines.” (Lisa de Rycke,Anne Blanchet chorégraphie le souffle , Le Temps, 18 juin 1999). Anne Blanchet ne cesse d’ouvrir des portes, des passages. Image de la vie, des barrières franchies et de celles à lever.

En 1999, elle disposait dans un parc public (Villa Bernasconi, Genève, exposition LE PRIVE ET L’INTIME) trois portes pliantes de métal blanc, animées chacune d’un rythme différent d’ouvertures et de fermetures. De plus, deux portes se fermaient lorsqu’on s’en approchait. OUVERTURE PLI, 1999 poursuivait la réflexion sur l’ouverture, le repli, l’empêchement et le passage. En novembre 99, Anne Blanchet remplace toutes les portes de l'appartement d'exposition hall-Palermo, à Genève, par des panneaux de verre immobiles: ARRET SUR IMAGE. "Les portes de l'appartement ont été remplacées par des panneaux de verre immobiles. Bloquées., entrebâillées, ces nouvelles " portes " ne peuvent ni se fermer, ni s'ouvrir. Le mouvement de va-et-vient habituel des portes est brisé. Utilisées d'ordinaire pour masquer, préserver l'intimité, les portes sont remplacées par du verre transparent. Fantômes de portes que ces panneaux de verre immobiles placés en biais dans l'embrasure. Ils permettent au visiteur d'entrer, mais modifient son allure. Sortes de chicanes qui donnent au visiteur une autre expérience du lieu. Question aussi sur le privé et l'intime, le mouvement à hall-Palermo s'est figé, un instant, et l'appartement est offert au regard" (Anne Blanchet, 1999). Pour l'exposition BEX ET ARTS 02, Anne Blanchet a construit, dans une chambre souterraine, une installation avec du courant 200 000 volts. Un pendule oscillait au-dessus d'un miroir en acier. Dès qu’il s’approchait de la masse d’acier, il provoquait un enchevêtrement d’arcs électriques qui se cassaient lorsqu’il s’en éloignait Au thème des Noces, elle répondait par une installation qui montrait l'attirance, l'attraction entre deux pôles (FOUDRE, 2002).

De cette installation, elle a réalisé deux travaux vidéo proches de la danse (FOUDRE 1 et FOUDRE 2). Les arcs électriques évoluent au ralenti. Lignes de feu, veinées de bleu, qui se cambrent, se rapprochent, se distancent, se confondent. Le son - même de la foudre, au ralenti, est parfaitement semblable à celui des battements du cœur.

Actuellement elle travaille à l’aménagement artistique de la nouvelle Université de Fribourg, Pérolles II. Sur une longueur de 220m, elle va installer dix-huit barrières de passages de 5m de long, équipées sur toute leur longueur de néons blancs. Fixées sur des mâts de 3m50, ces barrières monteront et descendront chacune selon un rythme différent. La journée on assistera à une chorégraphie colorée (mâts et barrières rouges). Et la nuit, le ballet de tiges rouges se transformera en un ballet de lumière blanche, qui jouera sur le sol, les façades et dans les arbres tout proches. (PONT DE LUMIERE, 2005) Parallèlement à son travail d’installations, Anne Blanchet réalise depuis 1994 des pièces en rapport étroit avec la lumière, ses LIGHT DRAWINGS. Des plaques de plexiglas, de plusieurs centimètres d’épaisseur sont coupées dans la masse. La ligne de coupe délimite des champs de lumières variables, créant ainsi des dessins de lumière. “C’est la lumière qui est sculptée par Anne Blanchet, pas la plaque de plexiglas qui reste parfaitement plane, malgré l’impression qu’elle donne d’avoir été creusée. Cette rencontre n’est jamais arrêtée dans le temps. C’est un instant capté par le spectateur, témoin de ce perpétuel recommencement: la composition du dessin représentant des formes géométriques élémentaires - ligne ou carré - ou des plans évoquant des éléments d’architecture - une paroi, un sol, un plafond-, est différente à chaque variation de l’orientation ou de l’intensité de la lumière. L’espace de l’oeuvre est modifié quand les zones d’ombres s’inversent, transformant un plan positif en un plan négatif.(...)

L’ensemble de l’oeuvre d’Anne Blanchet, dont la beauté plastique invite à la contemplation, incite donc toujours le spectateur à réfléchir et à s’interroger sur l’acte complexe du regard. Le spectateur expérimente la fragilité de sa propre perception et l’incapacité de distinguer le réel de l’apparent, ou découvre au contraire les possibilités insoupçonnées de voir l’imperceptible. Il évolue du monde sensible à l’univers de la pensée.”(Caroline Nicod, conservatrice du Musée des Beaux-Arts de Lausanne. Anne Blanchet. Le passage de la matière à l’immatériel. Musiques visuelles 1997-1999 Prix Gustave Buchet 2000. Catalogue)

Nombreuses expositions, dont THE SPIRIT OF WHITE, Galerie Beyeler, Basel 2003-4 et DESSINS DE LUMIERE,Galerie Alice Pauli, Lausanne, 2003. Prix Gustave Buchet 2000, Lausanne ( catalogue livre et vidéo. Textes de Caroline Nicod, conservatrice, et Vincent Barras ). Echanges 2003, Kunsthaus Langenthal (catalogue, textes de Marianne Burki, conservatrice et Caroline Nicod, conservatrice). Oeuvres dans des collections privées et publiques en Suisse, Belgique, France, Cambodge, aux Etats-Unis.

AEH 2005